Achkar Marof
Achkar Marof
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Naissance : 1930 à Coyah
Occupations : Directeur des Ballets africains
Représentant permanent de la Guinée auprès des Nations UniesArété en 1968 à sa descente de l'avion
Fusillé : le 25 janvier 1971.
Temoignage
Ne jamais oublier "l'époque où tout le monde avait peur en Guinée." Sortir des séquelles encore vivaces du règne de terreur de Sékou Touré est la condition sine qua non pour que la Guinée aille de l’avant. Prière de nous contacter si vous voulez contribuer aux buts du mémorial>>.
Temoignage
Ne jamais oublier "l'époque où tout le monde avait peur en Guinée." Sortir des séquelles encore vivaces du règne de terreur de Sékou Touré est la condition sine qua non pour que la Guinée aille de l’avant. Prière de nous contacter si vous voulez contribuer aux buts du mémorial>>.
Temoignage
Resume de la vie de Achkar Maroff
- Ancien élève de l'Ecole technique Bréguet de Paris
- Choréographe des Ballets Africains de Keita Fodeba (1955-1960)
- Conseiller culturel, Ambassade de Guinée à Washington (1960-1964)
- Représentant permanent de la Guinée, remplaça Telli Diallo, à l'ONU (1964-1968)
- Président du Comité Spécial des Nations-Unies sur l'Apartheid
- Auteur d'Apartheid en Afrique du Sud. Editions PNU. 1965
- Détenu et torturé au Camp Boiro, fusillé le 25 janvier 1971
- Thant, secrétaire général de l'ONU (1961-1971) au cours de son voyage en Guinée, interviendra, personnellement, en sa faveur, auprès de Sékou Touré qui lui promettra la libération de Marof.
- Promesse non tenue ! Pire, Marof sera fusillé” le 25 janvier 1971, sans jamais avoir été jugé ou condamné !
- (Portos Diallo. La vérité du ministre.)
Le différend Guinée-Côte-d ’Ivoire de 1967 et l’affaire Achkar Marof selon d’Issoufou Saidou Djermakoye, sous-secrétaire général des Nations-Unies
L’histoire qui suit montre comment Sékou Touré pouvait inventer une histoire pour créer des tensions sans aucune
raison. Ensuite, il accuse d’autres personnes d’avoir voulu monter un complot pour se débarrasser de lui. L’histoire
est extraite du Chapitre 39 — Annexe 2, de l’œuvre monumentale que l’ambassadeur de France en Guinée, André
Lewin a consacré à son ami dictateur, sous le titre de Ahmed Sékou Touré (1922- 1984). Président de la Guinée de
1958 à 1984. Le titre de l’Annexe 2 est Le différend Guinée-Côte-d ‘Ivoire de 1967 et l’affaire Achkar Marof d’après
les souvenirs d’Issoufou Saidou Djermakoye, sous-secrétaire général des Nations-Unies. Le président Houphouët-
Boigny était venu en visite officielle à Washington mais s’arrêta à New York pour discuter avec le Secrétaire
Général d’un conflit qui l’opposait à la Guinée. Le Président Sékou Touré avait arrêté des Ivoiriens se rendant en
Guinée et avait arraisonné leur bateau. Le Président Houphouët riposta en maintenant en Côte-d’Ivoire, où ils
avaient fait escale, le Ministre des Affaires [étrangères] de Guinée Louis Lansana Béavogui et son ambassadeur
Achkar Marof. Ces personnalités guinéennes revenaient d’une session ordinaire des Nations Unies. U Thant
ressentit cet acte comme une non- observation de la charte des Nations Unies et envoya en Guinée son chef de
cabinet adjoint Rolz-Bennett pour recueillir le témoignage de Sékou Touré. Celui-ci organisa une grande réception à
l’envoyé de U Thant et lui fit un cortège grandiose depuis l’aéroport jusqu’au palais présidentiel. Rolz-Bennett,
sensibilisé déjà par l’ambassade de Guinée à New York, n’avait jamais, de mémoire d’homme, reçu de sa vie une
réception d’une telle ampleur où la foule en délire scandait “Vive les Nations Unies, Vive U Thant”. Ce dernier
m’avait consulté au début du conflit, me disant qu’il ressentait cette affaire comme une offense personnelle. Je lui fis
comprendre avec beaucoup de doigté qu’il faisait une très grande erreur de jugement. Houphouët n’a pas l’habitude
d’aller à l’encontre des instances internationales. Le problème doit être vu simplement sur le plan africain et dans ce
cas celui qui a tort est évidemment celui qui a commencé à attaquer, l’autre n’a fait que de l’auto-défense. Par
ailleurs ce conflit se terminera comme il a commencé, brusquement et à l’amiable entre deux chefs d’État, de même
parti. Ils finiront par s’entendre et ce sera le plus jeune qui vous attaquera pour avoir blessé son aîné en transposant
le problème sur le plan international. Il ajoutera d’ailleurs qu’il ne vous a rien demandé et que c’est vous-même qui
avez grossi l’affaire pour votre image de marque. Il me remercia de mes conseils, mais sa pression sur Houphouët
ne faisait que continuer. Houphouët proposa alors l’envoi de deux secrétaires généraux adjoints pour l’échange des
otages : moi en Côte-d’Ivoire, Rolz-Bennett en Guinée. Aussitôt que les bateaux ivoiriens seraient dans les eaux
territoriales de son pays, un avion décollerait d’Abidjan pour y déposer le Ministre et l’Ambassadeur, ainsi ils
atteindraient Conakry avant que les bateaux n’atteignent Abidjan avec leurs passagers. U Thant refusa cette
proposition, nous envoya Rolz-Bennett et moi voir Houphouët à Paris avant son voyage à Washington. Rolz-Bennett,
que Houphouët reçut entre deux portes, lui parla avec force et exigea le relâchement immédiat des deux diplomates
guinéens, sans mentionner les bateaux ivoiriens et leurs passagers. Juste le ton qu’il ne fallait pas utiliser avec
Houphouët. Je ne dis mot mais pensai, Rolz vient de perdre la partie. Ce dernier s’en aperçut bien vite car
Houphouët ne lui répondit même pas, il dit simplement de sa voix douce, qui devenait encore plus douce pour voiler
sa colère : “Usher, occupe toi d’eux”, puis il referma la porte sur lui, nous laissant dans un grand salon avec son
ministre des Affaires étrangères. De retour à New York, il rendit compte à U Thant de l’échec de sa mission. Un
débat spécial fut ouvert en 5ème commission. Les conclusions de la commission furent l’échange, mais reconnurent
toutefois que le cas des diplomates engageait la responsabilité de U Thant. U Thant, sachant que Houphouët était
de passage, m’envoya au quai de débarquement pour lui souhaiter la bienvenue. Ce dernier ne me confia aucun
message pour lui. U Thant se déplaça pour lui rendre visite dans sa résidence de Long Island. Je l’accompagnai
sans Rolz-Bennett. La conversation devint plus détendue et Houphouët promit alors de lui rendre visite aux Nations
Unies avant son départ. Il vint, en effet, accompagné de son ministre des Affaires Étrangères Usher et de son
directeur de cabinet Nairay. Le débat entre les deux parties s’engagea et je fis un clin d’œil à Nairay qu’aperçut le
Président. Celui-ci devina et parla à l’oreille de Usher pour expliquer notre position. Usher réitéra l’envoi des deux
secrétaires généraux adjoints, l’un à Abidjan, l’autre en Guinée pour assister à l’échange, démontrant ainsi qu’il
prenait en compte la responsabilité des Nations Unies. On se quitta sans un accord décisif. Deux mois après,
conseil de cabinet du secrétaire général, tout le monde était à sa place sauf lui, occupé à téléphoner à Conakry. Il
vint furieux pour la première fois, l’homme se calma et devint impavide, tirant sa sérénité de sa foi en Confucius, vint
vers nous un télégramme à la main. He is mad, that man déclara-t-il en s’asseyant, “il est fou, cet homme”. Puis il
nous lut le télégramme qu’il venait de recevoir de Conakry de la part du Représentant résident, par lequel ce dernier
lui apprenait que toute son équipe et tous les experts américains devaient quitter la Guinée dans les 48 heures sous
le motif d’agents de la CIA conspirant à renverser le gouvernement guinéen. L’atmosphère devint pesante, Ralph
Bunche assis en face de moi, me lança glacial : It’s a shame for Africa. “C’est une honte pour l’Afrique.” Je souris et
me tus mais pensai, honte à partager tous deux. Ralph devina mes pensées et devint silencieux. U Thant décida :
“Je vais faire appel aux pays voisins pour qu’ils m’apportent leur concours, deux ont répondu déjà positivement, le
Sénégal et le Liberia. Je pense pouvoir trouver à temps les moyens nécessaires pour pallier cette situation on ne
peut plus inattendue.” La séance fut de courte durée, U Thant nous remercia et reprit ses activités pressantes. Il
m’appela peu après et me dit seul à seul : Djermakoye, dans le conflit Guinée/Côte-d’Ivoire, j’ai demandé votre avis
que j’ai délibérément écarté pour épouser les vues de Rolz-Bennett. Je me suis trompé et vous fais mes excuses.
Désormais pour tout ce qui concerne l’Afrique, c’est vous seul que je consulterai et appliquerai à la lettre vos
conseils. Ensuite c’est vous qui préparerez tous mes discours à l’OUA. Les Chefs d’État savaient ce qu’ils faisaient
en vous choisissant. Je le remerciai sincèrement de cette marque de confiance et promis de m’en montrer toujours
digne. L’affaire guinéo-ivoirienne se régla avec le temps comme je l’avais prévu, sans intervention des Nations-
Unies, par un commun accord des deux chefs d’État comme je l’avais toujours proposé, connaissant bien le passé
et le tempérament des deux chefs d’État concernés. Les bateaux affrétés au Sénégal et à Monrovia purent évacuer
le personnel des Nations Unies, un refroidissement des relations diplomatiques des USA et de la Guinée s’ensuivit
pour accusation injustifiée de ce pays contre eux et l’ensemble de la famille des Nations Unies. La guerre des
ondes commença avec cet art consommé dont seul Sékou avait le secret de transformer tout à son avantage pour
justifier sa décision. Mais les États-Unis firent la sourde oreille après une brève explication du porte-parole de la
Maison Blanche. Tout finit par reprendre son cours normal.